LA VENTE D’IMMEUBLE TRANSFRONTALIERE
Une mobilité croissante des citoyens européens
Les citoyens européens deviennent de plus en plus mobiles. Il n’est plus rare qu’ils s’installent, soit pour des raisons professionnelles, soit pour des raisons personnelles, dans un pays européen autre que le leur. Une explication de ce phénomène semble résider dans l’internationalité croissante des couples européens. D’après une estimation assez récente établie par la Commission européenne, il y a à peu près 16 millions couples internationaux en Europe. Par ailleurs, de nombreuses initiatives politiques visent à inciter les citoyens européens à exercer leur droit de libre circulation. Peu étonnant alors que s’établir dans un pays étranger n’est plus quelque chose d’exceptionnel. Il en va de même pour les résidences secondaires.
L’acquisition des biens immeubles situés à l’étranger
S’établir ailleurs peut aller de pair avec l’achat d’un bien immeuble. Malheureusement, une fois l’objet recherché trouvé, le planning ainsi que la mise en œuvre de l’acquisition s’avèrent souvent difficiles. Ce sont notamment les inconvénients et questions suivants auxquels presque tout acquéreur doit faire face dans le cadre d’une vente d’immeuble transfrontalière.
Il s’agit là, avant tout, d’aspects très pratiques : Quel professionnel dois-je contacter pour effectuer l’achat ? Quels sont, selon la législation étrangère applicable, mes droits et obligations relatifs à la vente ? Dans quelle mesure la législation étrangère diverge-telle de celle applicable dans mon pays d’origine ? Quid des conséquences juridiques au vu du régime matrimonial choisi qui est déterminé par ma propre législation ? Comment calculer, ne fut-ce que de manière approximative, l’importance des taxes, frais et d’autres droits redus, donc le coût total de l’acquisition ?
Se posent au surplus des questions relatives au déroulement de l’achat, par exemple, pour ce qui est de la durée exacte de la procédure de transfert de propriété à respecter avant que l’acquéreur puisse emménager l’immeuble. En outre, des délais légaux peuvent retarder la prise de possession.
De surcroît, le fait que l’immeuble est situé dans un autre pays et, peut-être, loin de la résidence habituelle de l’acheteur, est susceptible de compliquer considérablement les choses. C’est le cas notamment si des déplacements fréquents deviennent nécessaires pour faire avancer le dossier, circonstance qui engendre facilement des coûts supplémentaires importants.
Last but not least, des obstacles linguistiques doivent souvent être surmontés. Ceux-ci peuvent constituer un défi considérable, au vu notamment des termes techniques et juridiques étrangers employés tout au long du processus de l’acquisition. Il va sans dire que la maîtrise de ces notions n’est pas une évidence.
La création de la plateforme électronique d’échanges EUFides
Il y a déjà quelques années que les notaires européens, après avoir constaté la mobilité croissante des citoyens dans leur pratique quotidienne, décidaient de se charger des enjeux esquissés et de se pencher sur l’élaboration d’une solution.
Plusieurs options juridiques et techniques furent étudiées, dont notamment la mise en place d’une interconnexion des outils informatiques existant au sein de divers notariats européens. En 2012, l’option de créer une nouvelle plateforme électronique d’échanges a été retenue, ce qui donnait le signal du départ d’EUFides.
En ce qui concerne les aspects techniques, EUFides se base sur la plateforme d’échanges interactive que la Chambre des Notaires de Paris avait déjà testée et exploitée pendant des années et qui avait fait ses preuves.
Le recours à la plateforme EUFides est réservé aux professionnels qui sont, dans la vaste majorité des cas des ventes d’immeuble traités en Europe, des notaires de type latin. Ces experts en droit, nommés par l’Etat, sont installés par la loi dans 22 Etats membres de l’Union européenne (Allemagne, Autriche, Belgique, Bulgarie, Croatie, Espagne, Estonie, France, Grèce, Hongrie, Italie, Lettonie, Lituanie, Luxembourg, Malte, Pays-Bas, Pologne, Portugal, République tchèque, Roumanie, Slovaquie, Slovénie).
Dans l’immédiat, EUFides peut être utilisé par presque trois quarts des notaires exerçant en Europe et le nombre d’utilisateurs continue à augmenter. Depuis 2013, l’infrastructure informatique sous-jacente, tout comme les aspects économiques et juridiques de son exploitation, sont gérés par une association internationale sans but lucratif de droit belge. Celle-ci est financée par des notariats membres.
En quoi consiste la solution EUFides et quels sont les avantages pour le citoyen ?
Grâce à EUFides, les problèmes esquissés d’une vente d’immeuble transfrontalière peuvent être résolus. La collaboration transfrontalière entre deux notaires est la clef du succès d’EUFides.
L’exemple suivant d’un couple luxembourgeois entendant acquérir un immeuble sis en Espagne illustre les atouts qu’offre cette coopération européenne.
Une fois l’immeuble en question trouvé, le processus d’acquisition ne change pas beaucoup pour le citoyen par rapport à une vente « classique », c’est-à-dire à la vente d’un immeuble sis au Grand-Duché. Le couple luxembourgeois de notre exemple s’adresse, bien au contraire, tout simplement à son notaire luxembourgeois de confiance et l’informe du projet envisagé.
C’est ce notaire qui est le seul interlocuteur des acheteurs luxembourgeois lors de l’acquisition et c’est celui-ci qui leur explique, dans une langue qu’ils maîtrisent, tous les aspects juridiques et pratiques pertinents. C’est également ce notaire de proximité qui établit, en étroite coopération avec son confrère espagnol, une procuration d’acheter répondant aux exigences du droit espagnol. Ainsi, pour les acheteurs, la vente se fait presque complétement au Grand-Duché, ce qui évite notamment des déplacements à l’étranger fréquents.
Quant à la collaboration transfrontalière entre les deux notaires utilisateurs d’EUFides, le notaire luxembourgeois saisi contacte tout d’abord son confrère espagnol via la plateforme EUFides. Il lui soumet une convention de collaboration qui spécifie les tâches respectives à accomplir par chaque notaire. Une fois la convention conclue, chaque notaire entame les démarches lui incombant et s’occupe de la partie relevant de son propre droit, donc de l’application des dispositions de droit qu’il maîtrise le mieux.
Ainsi par exemple, le notaire espagnol, c’est-à-dire le notaire « rei sitae » établi dans le pays de la situation de l’immeuble, traite les aspects espagnols de l’achat. Il s’occupe, entre autres, de la fourniture du titre de propriété, contacte le registre foncier et effectue des recherches cadastrales. Il veille également au respect des dispositions spécifiques établies par la Communauté autonome espagnole sur le territoire de laquelle l’immeuble est sis et vérifie si l’objet de la vente est un immeuble d’intérêt culturel ou historique.
L’existence d’une assurance décennale peut également être un élément important du préparatif notarial. En outre, des questions d’urbanisme, de droit de préemption et la vérification si le bien est grevé d’une hypothèque sont à prendre en considération. Finalement le changement des propriétaires doit être signalé aux instances compétentes, et, le cas échéant, une inscription hypothécaire doit être faite.
Dans les coulisses, c’est la plateforme EUFides qui permet l’échange sécurisé de l’intégralité de la communication dont ont besoin les deux notaires travaillant ensemble.
source : Chambre des Notaires de Luxembourg